Astrophotographie : les bases de la photo pour bien débuter

Cet article a été rédigé par Alexis, astronome et astrophotographe passionné. Encore merci à toi Alexis pour ce super article ! 🙂


Aujourd’hui, la photographie est devenue anodine.

Eh oui, il nous suffit de sortir notre téléphone, de lancer l’application « appareil photo » et de cliquer sur un bouton pour réaliser un superbe cliché !

Mais lorsqu’on se penche plus sérieusement sur ce domaine, on s’aperçoit qu’il est beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît.

L’astrophotographie (qui regroupe l’ensemble des techniques photographiques utilisées en astronomie), par exemple, est peu connue du grand public.

C’est un domaine bien plus technique, qui requiert une bonne maîtrise de son matériel (d’astronomie mais aussi de photographie).

Mais avant de parler d’astrophoto, commençons d’abord par parler de photographie tout court.

Qu’est-ce qu’une photo ?

Une photo, appelée aussi exposition, est une image figée obtenue grâce à l’exposition d’une surface photosensible (halogénure d’argent ou capteur numérique) à la lumière.

Il peut arriver que certaines photos, comme les photos astronomiques, soient difficiles à réaliser car la quantité de lumière disponible est insuffisante. On parle alors de situation de basse lumière.

Nous allons voir dans cette série d’articles, comment prendre des photos en basse lumière afin de réaliser des photos du ciel nocturne.

Mais avant ça, il est important que vous compreniez bien comment fonctionne un appareil photo. Et c’est justement le but de ce premier article… C’est parti !

La composition d’un appareil photo

Pour commencer, nous allons voir de quoi est composé un appareil photo et comment fonctionne la prise de vue.

La chambre noire

Dans un appareil photo, la chambre noire est une boîte hermétique à la lumière, dans laquelle est percé un trou, le sténopé, qui permet d’exposer la surface photosensible.

L’obturateur

L’obturateur est un volet mécanique à l’entrée de la chambre noire, qui ouvre et ferme le sténopé plus ou moins rapidement. Il régule le flux de lumière qui pénètre dans la chambre noire.

Le temps de pose correspond au temps pendant lequel l’obturateur reste ouvert. On parle aussi de vitesse d’obturation.

C’est elle qui détermine le temps de pose d’une exposition, généralement entre 30 secondes et 1/4000 secondes. Il s’agit du « clac clac » caractéristique de l’appareil photo.

Le diaphragme

Le diaphragme se trouve dans l’objectif de l’appareil photo.

Il se compose de lamelles superposées en cercle qui s’ouvrent plus ou moins, ce qui contrôle la quantité de lumière qui entre dans l’appareil (image 1).

Cette ouverture se note f/x. Plus le chiffre est grand, plus le diaphragme est fermé (image 2). 

Image 1
Image 2

L’ouverture se modifie dans un appareil photo mais pas dans un télescope.

La surface photosensible collecte la lumière qui entre dans la chambre noire.

Avant l’apparition du numérique, la surface photosensible était composée d’halogénure d’argent déposée sur la bande des pellicules photo.  L’halogénure d’argent blanchit au contact de la lumière.

Aujourd’hui, ce sont les capteurs numériques qui collectent la lumière.

Capteurs numériques et ISO

La sensibilité du capteur s’appelle la sensibilité ISO. Plus le chiffre est élevé, plus le capteur devient sensible à la lumière.

Un capteur est composé de millions de pixels.

Chaque pixel va recevoir une certaine quantité de lumière et la mesurer en nuances de gris pour établir un niveau d’exposition (0 = noir sous-exposé, 255 = blanc surexposé).

En ce qui concerne les couleurs, chaque pixel reçoit une couleur entre le rouge, le vert et le bleu, et mesure l’intensité de la couleur qu’il reçoit. On appelle ça la matrice de Bayer.

Petite précision : il y a plus de pixels verts que de rouges et bleus. En effet, l’œil humain étant plus sensible au vert qu’aux autres couleurs, il fallait compenser cette particularité.

Selon les gammes des appareils photos, la taille des capteurs sera différente.

Il existe trois grands types de capteurs.

Le plein format

Le plus grand est le plein format qui mesure 24x36mm. C’est anciennement la taille des négatifs argentiques.

Les pleins formats ou Full Frame sont généralement les capteurs les plus performants du marché. Les appareils photo qui en sont équipés sont des appareils haut de gamme, globalement plus chers.

Du fait de leur taille et à nombre de pixels égal, ils captent plus de lumière et donc plus d’informations que les autres capteurs.

Ils ont aussi une meilleure gestion du bruit en sensibilité ISO élevée.

On les retrouve dans les appareils photo réflexes et certains hybrides.

Le capteur APS-C

Ensuite, il y a les capteurs APS-C. Ils sont en moyenne 1,3 à 1,6 fois plus petits que les pleins formats, leurs dimensions varient selon les constructeurs et la gamme de l’appareil photo.

Ce sont les capteurs les plus présents sur le marché actuellement.

Ils sont un peu moins qualitatifs que les pleins formats mais sont moins chers et peuvent quand-même se révéler très performants.

On les retrouve dans toutes les gammes d’appareils photos sauf dans les bridges et les compacts.

Le micro 4/3

Pour terminer, il y a les micros 4/3.

Deux fois plus petits que les pleins formats, ils peuvent facilement être intégrés à des appareils numériques plus petits comme les bridges et les compacts.

Leur taille n’en fait pas de mauvais capteurs mais ils sont moins adaptés pour les scènes où la luminosité est réduite.

appareil photo taille capteur

Objectifs et longueur focale

Une longueur focale correspond au trajet que parcourt la lumière dans un instrument optique (appareil photo ou télescope).

Voyons les différentes types de focales.

Le grand angle

On appelle grand angle, ou focales courtes, les focales allant de 15 à 30 mm (il s’agit du chiffre que vous voyez sur l’objectif à droite).

La focale standard

Les focales dites standards ont une longueur comprise entre 30 et 70 mm.

La focale longue

Les focales longues vont au-delà de 70 mm.

Plus une focale est longue, plus le zoom est important et plus l’angle est serré.

L’ultra grand angle

Pour des focales en dessous de 15 mm on parle d’ultra-grands angles (UGA).

Certains UGA sont appelés Fish-eye. Ces objectifs sont un peu particuliers car ils déforment fortement l’image en courbant les lignes, du fait de leur lentille frontale très bombée.

Un objectif d’appareil photo peut avoir deux caractéristiques différentes :

Une focale fixe, comme 14 mm, 35 mm, 50 mm, etc.

Et des focales variables appelées zoom comme les 18-55 mm, 24-70 mm, 70-200 mm etc.

Les téléobjectifs sont des focales longues et fixes comme 135 mm, 400 mm, 600 mm …

Une chose très importante à savoir sur les capteurs c’est que les longueurs focales des objectifs sont basées sur les dimensions du plein format.

Pour les capteurs plus petits, il faut donc prendre en compte le facteur de crop (= recadrage) : plus le capteur est petit, plus on aura un effet de zoom sur la photo.

Il faut donc adapter votre objectif à la taille de votre capteur. Exemple : un objectif de 20 mm de focale sur un APS-C Nikon sera en réalité équivalent à un 30 mm.

Un 300 mm sur un APS-C Canon fera un 480 mm et un 50 mm sur un micro  4/3 Panasonic fera un 100 mm.

aps c et plein format
Exemple de crop (ou recadrage)

L’exposition

Maintenant que vous savez de quoi se compose un appareil photo, je vais vous expliquer comment

triangle exposition

exposer une image.

L’exposition est un équilibre entre ouverture, temps de pose et sensibilité ISO. On parle aussi de triangle d’exposition.

Cette exposition se fera en fonction de la quantité de lumière disponible pour une scène voulue.

Si l’on veut prendre une photo en extérieur lors d’une belle journée d’été, la quantité de lumière sera importante.

À l’inverse, si l’on veut immortaliser un coucher de soleil, la quantité de lumière disponible sera faible. Dans ces deux cas, les réglages seront différents.

Pour une grande quantité de lumière, il faudra appliquer une sensibilité ISO faible, (100 ou 200 ISO), une ouverture d’objectif plutôt faible (f/10, f/13), et une vitesse d’obturation très rapide (1/200 ou 1/300 de secondes).

Pour une quantité de lumière plus faible, il faut augmenter la sensibilité ISO (entre 400 et 800 ISO), l’ouverture du diaphragme (f/7.1 ou f/8), et la vitesse (60 et 1/80  de secondes).

Il faut donc adapter les réglages à chaque situation lumineuse.

Photo en forte luminosité : ISO 100, f/8, 1/160 sec
Photo en basse luminosité : ISO 800, f/8, 13 sec

Utiliser l’histogramme

Pour vérifier si votre exposition est bonne, vous pouvez vous appuyer sur l’histogramme de votre image.

C’est un graphique qui vous permet d’en apprendre beaucoup de votre exposition. Il va se faire en fonction de l’exposition de chaque pixel de l’appareil photo.

Sur l’axe horizontal est représenté le niveau de luminosité allant du noir au blanc en passant par tous les tons intermédiaires.

L’axe vertical lui mesure la quantité de pixels pour chaque ton représenté.

histogramme

1 : Représente les « Noirs ». Si le capteur n’a pas reçu assez de lumière lors de l’exposition alors les noirs sont dits « bouchés » et n’auront aucune information d’exposition.

2 : représente les « ombres » les tons sombres.

3 : représente les tons moyens

4 : sont les hautes lumières.

5 : ce sont les blancs (l’inverse des noirs), si ceux-ci sont trop exposés on dit qu’ils sont cramés et n’auront pas non plus d’information d’exposition.

Une bonne exposition est une exposition où la lumière est répartie sur tous les tons de l’histogramme.

Cependant, le capteur enregistre plus d’informations dans les hautes-lumières que dans les ombres. Il faut donc essayer, en situation de lumière difficile, d’exposer à droite (ou au tiers) sa photo, sans cramer les blancs, pour obtenir un maximum d’informations dans les tons sombres.

Le graphique A ci-dessous est une représentation d’une photo sous-exposée avec des noirs bouchés.

Histogramme noirs bouchés
Graphique A

Le graphique B représente quand à elle une surexposition avec des blancs cramés.

Histogramme blancs cramés
Graphique B

Et le graphique C une image exposée à droite.

Graphique C

Les différents modes

Les appareils photo sont équipés de différents modes qui permettent à l’utilisateur de régler lui-même tout ou une partie de ces paramètres, ou de laisser l’appareil photo les régler automatiquement.

  • Le mode « Manuel » (noté M sur les appareils) : l’utilisateur choisit chacun des réglages indépendamment des autres.
  • Le mode « Priorité à l’ouverture » (noté A ou Av selon les fabricants) : l’utilisateur choisit l’ouverture qu’il souhaite appliquer à sa photo et l’appareil règle automatiquement le temps de pose en fonction de la situation lumineuse.
  • Le mode « Priorité à la vitesse » (Noté S ou Tv selon les fabricants): l’utilisateur choisit le temps de pose et l’appareil gère automatiquement l’ouverture.
  • Le mode « Programme » (noté P sur la molette de sélection des modes): l’appareil choisit lui-même un couple ouverture/vitesse en fonction de la scène. L’utilisateur peut changer ce couple grâce à la molette de sélection. 

appareil photo mode

Dans le monde de la photo, ces modes sont plus couramment appelés les modes créatifs.

Le réglage de la sensibilité ISO est le plus souvent manuel car la quantité de lumière ne change pas drastiquement lors d’une séance photo, mais il peut aussi être géré automatiquement.

La sensibilité ISO n’augmente pas le nombre de photons qui atteignent le capteur, c’est ce dernier qui amplifie le signal lumineux qu’il reçoit. Par conséquent, une forte sensibilité ISO amène sur l’image un genre de grain appelé le bruit, et dégrade ainsi le résultat final.

C’est un peu comme le son d’une radio. Plus le volume est fort et plus le son sera saturé et finira par être incompréhensible.

C’est la même chose avec les ISO, plus ils sont élevés plus l’image finale sera saturée par un grain inesthétique. Plus votre capteur sera de bonne qualité, meilleures seront vos photos en ISO élevée. En photo, il y une limite d’ISO à ne pas dépasser pour un résultat optimal.

C’est à vous de définir cette limite : pour la trouver, prenez plusieurs photos avec différents temps de pose, dans différentes situations de luminosité, en augmentant les ISO progressivement, jusqu’au maximum de l’appareil.

Puis, comparez les différents résultats obtenus pour définir la sensibilité ISO maximale que vous appréciez, en fonction de votre ressenti.

Lors des situations de basse lumière, il faut augmenter les ISO et ouvrir le diaphragme au maximum.

C’est à ce moment-là qu’il faut utiliser une vitesse d’obturation très lente pour permettre au peu de lumière disponible d’exposer le capteur.

On parle alors de poses longues. En photo, les poses longues sont un moyen qui permet d’éviter de pousser sont matériel dans ces derniers retranchements.

C’est donc la longueur des poses qui fait toute la technicité de l’astrophotographie. (Eh oui, les astres sont très très peu lumineux !)

Flou de mouvement et flou de bouger

flou de mouvement

Le flou de mouvements se produit quand la vitesse d’obturation est plus lente que le mouvement que l’on photographie. L’image résultante est flou car le sujet s’est déplacé pendant l’exposition.

Le flou de bouger, quant à lui, se produit quand la vitesse d’obturation est trop lente par rapport aux mouvements du corps du photographe. L’image n’est donc pas nette parce que l’on a bougé pendant l’obturation.

Le trépied sert à éviter ce flou de bouger pendant une pose longue. Et la stabilisation, sur un objectif, permet de compenser (jusqu’à un certain point) le mouvement de notre corps.

Astrophotographie et mouvements

Le filé d’étoile en circumpolaire est un flou de mouvement et le filé d’étoile en ciel profond est un flou de bouger.

Plus la focale est longue, plus ce mouvement s’amplifie et donc plus il se voit sur la photo.

Pour l’éviter, il suffit de faire une calcul très simple : 1 / (2 fois la longueur focale).

Le chiffre que vous obtenez correspond à la vitesse d’obturation minimale pour éviter d’avoir un flou de mouvement.

En astrophotographie, nous utilisons donc toujours un trépied. Encore une fois, parce que les astres sont très peu lumineux et qu’ils nécessitent donc une pose longue. 

Pour photographier les planètes et les objets du ciel profond, nous utilisons une monture équatoriale motorisée. Celle-ci permet de compenser le mouvement de la Terre, et ainsi éviter le flou de bouger.

Voilà pour cet article. Nous espérons qu’il aura pu vous aider à mieux comprendre le monde de la photographie et vous permettra de mieux utiliser votre appareil photo.

Dans l’article suivant nous rentrerons dans le vif du sujet : comment faire vos premiers clichés d’astrophoto !

12 réflexions au sujet de “Astrophotographie : les bases de la photo pour bien débuter”

  1. Merci pour ce rapide tour d’horizon de la photographie en général qui est très bien expliqué. C’est clair précis et le principal y est 😉
    J ai hâte de lire la suite. Bravo

    Répondre
  2. Bonjour,

    Superbe article comme entrée en matière, hâte de lire la suite!
    Ne disposant pas d’une monture motorisée ni d’une reflex performant (format aps-c et pas mal de bruit quand on augmente la sensibilité) pour le moment je met l’astrophoto en attente mais le sujet est très intéressant.

    Merci à vous

    Jerome

    Répondre
  3. Merci à l’auteur de cette article qui est trés bien fait ! 👍
    Cela m’aide beaucoup au niveau des réglages de mon appareil photo.
    J’attend le second article avec impatience !
    Bravo 👏
    Jessica

    Répondre
  4. Merci pour cet article, cela me permet d’apprendre à vitesse V
    maintenant c’est à moi de faire mes preuves en espérant que mes résultats seront aussi bien que cette article.
    Bravo 👏

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